Son Amie, la Peur 

Hommage à toutes celles et ceux

qui serrent encore les dents le jour de la rentrée 

Ce matin, une larme coule sur sa joue et je la laisse couler, comprenant dans cet instant qu’à chaque rentrée, qu’à chaque changement, cette larme reviendra. Je ne peux rien faire d’autre que voir et accepter. Je ne suis pas une maman toute puissante qui telle une déesse grecque, aurait le privilège de tremper mon enfant dans un bain de guérison des blessures de l’âme.

Arrrrghh! A quoi bon faire comme si cela allait passer. Cette blessure est son trésor qui a ouvert dans sa conscience une brèche de fragilité laissant entrer la lumière de la tolérance, de la compassion et de la sensibilité aux blessures des autres.

Je suis là, les bras ballants, la pensée en berne, le moral dans les chaussettes en la regardant fondre des yeux. Mais soudain, inspirée par le ciel bleu de septembre, une idée bouscule ma torpeur. Et si cette peur qui fait surface à chaque épisode inconnu, était sa meilleure amie? Vous savez, l’amie qui anticipe parce qu’elle vous connait bien, l’amie qui vous protège de son bras maternel, qui va s’opposer à ceux qui vous cherchent des poux dans la tête. La meilleure amie, quoi! 

Je profite d’un intermède où elle plonge dans son mouchoir pour rassembler mes mots. Je lui présente ce personnage sympathique à ses côtés qui veille sur elle en la mettant en garde. Je lui demande de faire ce léger pas de côté pour voir clairement à quoi ressemble cette amie de l’ombre qui refait son apparition à chaque rentrée. Bien sûr, cela requiert un peu d’imagination. Les enfants ne sont-ils pas les maîtres d’univers fantastiques. Elle me la décrit avec beaucoup d’application. Les détails sont si précis que je parviens à la distinguer. Certes, cette amie n’a rien de la licorne multicolore mais sa présence est puissante, alors autant compter dessus. 

Magiquement, les larmes refluent. Elle n’est plus seule. Son amie la peur est à ses côtés. Ce soir quand elle rentrera, je saurai si sa nouvelle amie lui a redonné le sourire. Peut-être même que d’autres seront venues se greffer à leur binôme inséparable!

Post Scriptum : je ne me sens jamais autant maman que dans ces moments clefs où mon intervention infléchit la croissance psychique de mes enfants. Soyons subtile et à l’écoute!